Aussi paradoxal que cela puisse paraitre, le Sénégal qui a contribué à la formation des élites africaines est sans bibliothèque nationale.
Ce qui indigne les universitaires, notamment les archivistes et historiens, philosophes, réunis, hier à l’Harmattan pour rendre hommage à feu Amady Aly Dieng. «C’est très révélateur des options inefficaces. Le fait qu’on n’ait pas fait de bibliothèque nationale, depuis l’indépendance montre la faiblesse des politiques culturelles. C’est le fondement. Si vous allez aux Etats-Unis, la première des choses qu’on vous montre, c’est la bibliothèque du Congrès. En France, on vous parle de la Bibliothèque nationale. Cela montre que, chez nous, les politiques culturelles ne sont pas inclusives, qu’elles sont à la marge. Personne ne peut dire le nombre de documents en langue nationale. Un pays ne peut pas se propulser sans avoir une idée claire de son patrimoine. Chaque Sénégalais à ses manuscrits à la maison», crache Bouba Diop, en marge de la rencontre. De l’avis de M. Diop, la bibliothèque de l’Ucad est aujourd’hui la plus fournie. Ce qui, d’après lui, «est une catastrophe». Ce qui écoeure l’historien c’est qu’«on a préféré régler d’abord le problème des lutteurs ». Ce qui le conduit à dire que «les autorités ont eu zéro sur la question du livre et de la bibliothèque nationale». Pourtant, révèle-t-il, «l’argent et le terrain ont été donnés. Mais on a préféré laisser la priorité à autre chose». A en croire le professeur d’histoire, «cela peut être fait en deux, trois ans puisque des études ont été faites».
Dans la même veine, l’historienne, Penda Mbow souligne qu’«il y a nécessité de construire la Bibliothèque nationale du Sénégal et la Maison des archives parce que ce sont ces instruments qui constituent des lieux de mémoire et permettent de mesurer l’évolution et la modernité d’une société ». A son avis, «on ne peut pas être un pays qui a produit de très grands noms sur le plan intellectuel et ne pas disposer d’une bibliothèque nationale».
Dans la foulée, les participants à l’hommage à feu Amady Aly Dieng ont proposé qu’on donne le nom de ce dernier à la future bibliothèque nationale à cause de son apport à la mémoire du Sénégal. Un colloque va être organisé pour magnifier l’homme.
Emile DASYLVA