CONTRIBUTION
L’Afrique de l’Ouest a été et continue d’être le théâtre d’opérations de plusieurs conflits armés depuis plusieurs dizaines d’années. La montée du djihadisme, la criminalité transnationale, le trafic d’armes et de stupéfiants, la piraterie, les insurrections, les enlèvements et j’en passe sont autant de menaces pour la sécurité sous régionale. En plus de cela, certains pays traversent des crises humanitaires générées par le conflit armé au Mali, l’action des extrémistes religieux au Nigeria. Aussi, il y a la sécheresse et l’insécurité alimentaire dans la région du Sahel, en particulier au Niger et au Burkina Faso. Face à ce tableau sombre de l’Afrique et la situation d’instabilité quasi permanente dans laquelle baigne le continent, il y a lieu de s’interroger sur le mode de fonctionnement de nos Etats pour juguler ces questions. Quoiqu’il soit impérieux, voire nécessaire de revoir certains mécanismes, pour ne pas dire organismes africains qui n’existent que sur le papier du fait de leur inertie.
Le cas de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) qui peine à trouver des solutions aux problèmes des populations en matière d’apaisement et de règlement des conflits est assez évocateur. Sinon comment comprendre qu’un organisme à la dimension de la Cedeao, avec des organes forts et bien structurés, n’arrive point à trouver une réponse aux multiples crises qui secouent l’Afrique de l’Ouest ? On me dira que c’est une institution qui manque de ressources financières à la hauteur de ses ambitions. On évoquera le comportement irrespectueux de certains Etats de la Cedeao qui ne s’acquittent pas de leur contribution au bon fonctionnement de l’organisme. Mais à quoi bon alors mettre en place un tel organisme sous régional s’il faut, par la suite, aller «quémander» des sous à l’étranger ? Quelle honte !
C’est dire donc, malgré les richesses que regorge notre continent, nos chefs d’Etat n’arrivent toujours pas à se départir des puissances occidentales. Cette situation est inacceptable. Les Etats membres de la Cedeao doivent être capables de trouver les moyens nécessaires pour son fonctionnement tant du point vue financier que matériel. A défaut, elle devrait être dissoute parce qu’ayant atteint ses limites. Au Niger, les militaires tombent comme des mouches faute d’armement. Au Mali, l’armée est dépassée parce que sous équipée à l’image des troupes africaines. Dans des circonstances pareilles, sommes-nous en mesure de parler d’indépendance si on peine à garantir la sécurité de nos peuples ? S’il faut recourir aux forces armées européennes pour régler nos conflits internes, alors autant se remettre en cause.
En réalité, aucun Etat n’acceptera de sacrifier les enfants de sa patrie pour une autre nation. Sachant que l’Etat n’a que des intérêts, il y a lieu de repenser la stratégie de collaboration de l’Afrique avec l’Europe pour mieux préparer le legs aux générations futures. D’ailleurs, en lieu et place de régler les foyers de tension en Afrique, le recours aux forces de sécurité européennes est une voie à l’installation de l’anarchie, de la débauche, de l’expropriation de terres, de l’exploitation à outrance de nos richesses entre autres. Egalement, cela augmente les frustrations des populations déjà désœuvrées qui finissent par emprunter la voie de la violence pour revendiquer ce qui leur est de droit.
Dans un autre postula, il faut savoir que l’Afrique fait face à de nouveaux enjeux et défis sécuritaires avec l’émigration irrégulière qui constitue non seulement une bombe sociale, mais un phénomène grandissant avec son corollaire. Pourtant, la somnolence de la Cedeao est telle qu’il n’y a aucune initiative qui est pensée pour mieux anticiper ces phénomènes nouveaux pour éviter d’être dépassé et favoriser la mise en place d’un dispositif énergétique et efficace de réaction. Pis, il y a les enjeux économiques de l’espace ouest africaine qui est convoitée de partout. Au moment où un royaume tel que le Maroc, des pays comme l’Algérie se bousculent au porte de la Cedeao, les Etats déjà membres restent figés en lieu et place de travailler au renforcement de capacités dans une approche holistique dynamique et inclusive prenant en compte les nouveaux défis et les enjeux économiques. Il est temps de tourner la page du visage hideux de l’Afrique comme continent d’instabilité. L’heure du réveil doit sonner et pour la Cedeao le moment d’agir.
Moussa Seydou DIALLO
Journaliste/Reporter
Chargé du partenariat de l’Association des journalistes
en migration et sécurité du Sénégal (Ajms)