A la pose de la première pierre de l’aéroport international Blaise Diagne (AIBD), Ousmane Tanor Dieng et Moustapha Niasse avaient, dans une mortelle ironie, raillé ce qu’ils considéraient comme un «éléphant blanc» de Me Abdoulaye Wade.
Ce jeudi, leur exaltation a été à la mesure de leurs acerbes critiques. Laudateurs, les deux anciens compères au Parti socialiste l’ont été à l’inauguration dudit aéroport.
Ousmane Tanor Dieng et Moustapha Niasse, tels des caméléons, changent de discours en fonction des circonstances. Jadis très critiques envers l’aéroport international Blaise Diagne (Aibd), ce jeudi, à son inauguration, ils ont entonné la plus mélodieuse des tonalités. «Cette inauguration est un jalon, un maillon, une étape sur la longue marche qui conduit au développement de ce Sénégal qui assume son destin par le travail et l’effort», a déclaré le président de l’Assemblée nationale. S’il s’en était arrêté là, le passé n’aurait pas besoin d’être invoqué. Mais Moustapha Niasse torpille l’histoire en ajoutant : «Nous devons rendre grâce à Dieu le Tout-Puissant qui a fait que les sociétés avancent toujours vers le progrès, en conjuguant le passé, le présent, l’effort et le développement. Aujourd’hui, Dieu a voulu que ce soit sous le régime du Président Macky Sall que nous sommes là, en train d’inaugurer l’aéroport international Blaise Diagne de Diass. Sur ce, il faut remercier le président de la République». En faisant une telle observation, le leader de l’Alliance des forces de progrès ravale ses vomissures et amorce un virage à plus de 180 degré. En effet, très critique envers le Président Wade, Moustapha Niasse ne ratait pas une occasion pour dézinguer les projets de celui qu’il décrivait comme «un homme qui décide tout seul, qui agit tout seul et qui se trompe tout seul». L’aéroport, qui ne portait pas encore le nom de Blaise Diagne, n’avait pas échappé à ses diatribes. «La totalisation de leurs coûts de réalisation poserait un problème même à des pays riches comme ceux d’Europe et d’Amérique du Nord, tellement sont élevés ces coûts. Me Wade peut être sincère, mais a-t-il conscience de ce que ses projets faramineux sont, pour la plupart, irréalisables. Il semble que les travaux de l’Aéroport international Blaise Diagne de Ndiass ont commencé par la clôture. C’est une première, dans l’histoire des travaux de cette envergure, en Afrique et peut-être même dans le monde», avait déclaré dans une interview avec le journal Le Quotidien en date du 7 juin 2004.
Moustapha Niasse n’est toutefois pas le seul à s’être trompé au sujet de l’Aibd. Le président du Haut Conseil des collectivités territoriales (Hcct) s’était aussi signalé par de virulentes critiques envers l’aéroport de Diass. Parlant des projets de Me Wade, le responsable socialiste avait rétorqué : «La réalité rattrape toujours ceux qui se bercent d’illusions sans lendemain. La réalité, ce sont les entrepreneurs que leur propre gouvernement, par des méthodes connues, a délibérément décidé d’exclure de la vie économique en bradant toutes les ressources nationales à son propre profit et au profit de quelques obscurs princes venus d’Arabie. La réalité, ce sont enfin les promesses toujours mirobolantes, les trains à grande vitesse et les tramways qui circulent dans notre imaginaire et qu’on aura l’occasion d’emprunter dans quatre ans au moment où ce gouvernement sera encore incapable de fournir l’électricité aux ménages, du carburant aux automobilistes, des intrants aux agriculteurs, et du pain à ceux qui ont faim».
Ce jeudi, à l’inauguration de cet «éléphant blanc», le discours d’Ousmane Tanor Dieng a été tout autre. «L’Aibd peut rivaliser avec n’importe quel aéroport du monde… j’ai fait plusieurs aéroports, celui-ci fait partie des plus beaux», s’est-il extasié.
Autant de remarques et d’observations qui doivent bien faire sourire Me Wade. Ces plus virulents détracteurs, en avril 2005, quand il posait la première pierre, ont trouvé suffisamment de peinture, avec leurs nouvelles responsabilités, pour colorier cet «éléphant» qui est devenu tout sauf blanc.
Mame Birame WATHIE