CONTRIBUTION
Dans une récente contribution, je mettais en exergue notre «attachement viscéral à la France» malgré toutes nos «sautes d’humeur» feintes ou réelles pour réclamer notre véritable indépendance. Et voilà, qu’avant même que l’encre de ma contribution ne soit bien séchée, la cérémonie d’«African Leadership Awards», célébrée samedi dernier à Paris, vient nous jeter à la figure notre condition atavique «d’esclaves volontaires» de la France. Diantre !!! Aller jusqu’en France pour honorer des leaders africains ? Cela veut dire quoi ? Tant qu’il s’agissait de «leaders Africains», pourquoi à Paris ?
C’est pourquoi, je joins ma voix indignée et très irritée à celle du Dr Ndiaye qui, dans une belle contribution publiée dans la presse du mardi 6 novembre 2017, a dénoncé avec force, cette imposture qui n’est que la face visible d’une entreprise d’escroquerie de haut vol perpétrée par une organisation, ou plutôt par un homme qui se targue d’être un grand entrepreneur sénégalais et dont on attend toujours de savoir quelles sont les entreprises qu’il pilote et dans quels domaines d’activités et pour quels produits ou services ? Sur ce plan, la bienséance la plus élémentaire lui commande de répondre aux interrogations légitimes du sieur Ndiaye dans sa contribution citée supra. Qui est-il réellement ? Que fait-il vraiment ? On aimerait bien savoir.
Pour en savoir un peu, j’ai cliqué sur Google/Meds et je n’y ai découvert que des déclarations d’intention sans épaisseur sur un mouvement qui regrouperait plus de mille entreprises principalement des Pme/Pmi sans aucune autre précision. Maigre, vraiment trop maigre… Mouvement structuré avec un conseil d’administration et un président élu pour un mandat de cinq (5) ans et dont le siège est occupé depuis 2000 par notre bonhomme qui en est donc à son 4ème mandat. Et l’alternance dans tout ça ? On en fait quoi ? Nous, on a tout compris. C’est son fromage. Il ne va rien céder. Qui est fou ? Passons.
Les grands et vrais capitaines d’industries ou entrepreneurs ou commerçants de ce pays sont bien connus et leurs activités bien reconnues par les populations même si certains cultivent à l’extrême, la discrétion. Quid du Meds et de son président ? Que celui qui a la réponse nous éclaire !!!
Pour en revenir à cette soirée grotesque, il faut d’abord s’étonner de son titre anglicisé «African Leadership Awards» dans le pays, berceau de la Francophonie… Quel complexe ! Mais comme Paris «is for sharing» pour les Jo de 2024, on ne peut pas être plus royaliste que le roi, n’est-ce pas ? Avez-vous déjà vu aux Usa ou en Angleterre ou en Chine ou au Japon ou en Corée du sud, des évènements titrés en français ? Jamais. Toujours en anglais, chinois, japonais ou coréen… Seule la France traîne le complexe de l’anglais au point de faire, pour un évènement planétaire de la dimension des Jo, de la réclame dans cette langue au mépris de sa propre langue. Il fallait le faire. Et l’élève (africain) suit le sillon tracé par le maître (français) en parlant «d’African Awards». Pitoyable…
Pauvre France qui ne se bat plus pour son français… Et qui continue à parler de francophonie à nous autres, demeurés africains qui veulent continuer à y croire. Heureusement que le Rwanda a vite compris que la Francophonie tend plutôt vers la «Francofinie» et a pris ses distances… salutaires. Ensuite, le ridicule ne tuant plus depuis Molière, on y a honoré des dirigeants français «africanisés». Quelle farce !!! D’ailleurs, l’expérience a fini de convaincre que ces cérémonies de distinctions honorifiques sur fond d’agapes gargantuesques, de musique profane et de rendez-vous galants ne sont que des pantomimes risibles d’une caste de nouveaux parvenus et dont la plupart se repaissent des deniers publics mis à leur disposition.
Sous ce rapport, il serait intéressant que les corps habilités de l’Etat engagent des contrôles inopinés dans certaines entreprises ou structures publiques dont les responsables étaient présents au «Bercy du Meds». Ils ne seraient pas étonnés de constater que, durant la période du 30 octobre au 5 novembre, nombre de ces responsables ont fait la bamboula à Paris, à partir de justificatifs fallacieux de voyages d’études, missions, séminaires, Benchmarking, etc., avec billet d’avion et perdiums de leur entreprise ou structure pour recevoir leurs trophées, hilares, à l’image du «Vieux nègre et sa médaille» de Ferdinand Oyono. Jamais avec leur propre argent.
Des trophées en toc qui ne sont que des succédanés factices négociés au prix fort par des responsables en mal de visibilité et qui d’ailleurs, très souvent sont dans le pétrin après avoir glané un de ces trophées «maudits». Cheikh Kanté actuellement sur la sellette en est une parfaite illustration, lui qui a reçu le Cauris d’Or de l’entrepreneur le plus innovant il y a peu. Bon !! Comme il faut s’amuser entre grands enfants, on organise à tour de bras des cérémonies du genre. Il ne se passe pas de semaine sans qu’il n’y ait une de ces soirées festives sous divers formats. Cauris d’or, Marteau d’Or, Nuit des Sédar, Grande Nuit, diner-débat, etc. Affligeant.
En fait et sans avoir à revenir sur les préoccupations légitimes et très pertinentes exprimées par M. Ndiaye sur les aspects financiers, sur les bailleurs, sur la légitimité du sieur à délivrer des prix et distinctions, etc., il est tout de même étonnant que, dans un pays organisé comme se targue de l’être le Sénégal, on puisse s’ériger en leader d’opinion, d’entreprise ou religieux sans avoir démontré ou montré une capacité quelconque dans les domaines considérés. Cela est facilité – il faut en convenir – par une culture de la triche, de l’imposture et du mensonge permanent érigé en système de promotion sociale.
Ils sont nombreux, très nombreux dans notre pays, ceux qui traficotent leur Cv avec des diplômes virtuels et des expériences professionnelles tronquées pour occuper des positions et stations sans commune mesure avec leurs compétences réelles. Ils surfent sur les vagues, déploient des trésors d’ingéniosité pour pénétrer des milieux huppés, adhèrent à des lobbies occultes, font de l’activisme à outrance pour l’avoir et le paraître à tout prix. Sans jamais être en mesure de vous dire ce qu’ils font réellement dans la vie en termes d’occupation professionnelle. Et on laisse faire !!!
Cette race de prédateurs sociaux qui est la véritable gangrène de la société sénégalaise et qui donne un miroir déformant de la réussite sociale à nos jeunes en mal de discernement, aura toujours de beaux jours devant elle tant que prospéreront le mensonge endémique, l’hypocrisie institutionnalisée et l’imposture légalisée, érigés en système de promotion sociale dans notre pays. Au pays de l’imposture, du faux et du parjure, tout est permis. A quand le retour à nos valeurs ancestrales de diom, de mougn, de kersa et de travail pour un Sénégal véritablement émergent ? Que Dieu nous garde et garde le Sénégal des sangsues de toutes sortes.
Guimba KONATE