Le danger ne vient pas tout le temps là où on l’attend. Pour les élections législatives, les ennemis du chef de l’Etat viennent de son propre camp.
Il s’agit des rivalités internes qui risquent de conduire à des listes parallèles et des votes sanction.
Ce n’est pas seulement une opposition unie et déterminée à imposer la cohabitation que le chef de l’Etat et chef de la coalition Benno Bokk Yaakaar devrait faire face le 30 juillet prochain. Macky Sall devra aussi affronter deux ennemis aussi redoutables qui minent la coalition présidentielle. Il s’agit du vote sanction et des listes parallèles au sein de son parti l’Apr, au sein des alliés mais aussi au sein de la coalition présidentielle. C’est dire que les investitures seront déterminantes pour la mouvance présidentielle. Tout se jouera pendant cette période. Les responsables de l’Apr et des partis alliés qui seront laissés en rade vont croiser les bras durant la campagne électorale. D’autres vont mettre en place des listes parallèles et d’autres enfin vont appeler au vote sanction.
Dans le département de Pikine, des socialistes pourtant favorables à la direction du Ps, ont déjà annoncé leur décision de ne pas se ranger derrière les responsables de l’Apr. Ces socialistes, qui accusent les apéristes d’avoir pris tous les postes destinés à la ville, vont présenter leurs propres listes. «Le maire de la ville de Pikine est un apériste, le questeur de l’Assemblée nationale est également de l’Apr. En plus, les deux postes au Conseil économique, social et environnemental dédiés à la ville sont occupés par des membres de l’Apr qui a également des élus au sein du Haut conseil des collectivités territoriales», dénonce un responsable de coordination socialiste à Pikine.
En outre, ce dernier, qui parle sous le couvert de l’anonymat, prédit même des défections chez les partisans d’Ousmane Tanor Dieng au profit du maire de Dakar, Khalifa Sall. Il affirme que les socialistes qui ne seront pas investis sur les listes de la coalition, vont rejoindre les listes du maire de Dakar pour protester contre leur mise à l’écart. Et cette situation risque de se produire dans toutes les localités où apéristes et socialistes vont s’affronter. C’est le cas, par exemple, à Dagana où les socialistes réclament la tête de liste départementale. C’est le même cas également dans plusieurs communes de la capitale. Les partisans du ministre d’Etat Mbaye Ndiaye, le premier responsable Apr des Parcelles assainies acceptent mal ce qu’ils appellent le parachutage du ministre Amadou Bâ. Même s’ils ne parlent pas ouvertement de vote sanction, certains affirment qu’ils ne vont pas s’empresser à se rendre aux urnes le 30 juillet.
A Mbacké, les socialistes exigent la tête de liste de la majorité présidentielle, estimant qu’il n’est plus question de jouer les seconds rôles.
A Guédiawaye, ce sont les partisans du maire Aliou Sall qui prédisent des listes parallèles au cas où la liste départementale serait dirigée par un autre. «Si Aliou Sall n’est pas investi tête de liste départementale, le parti et la coalition courent des risques insoupçonnés, dont le plus grand est les candidatures plurielles au sein de la mouvance présidentielle», explique Yaya Kane. Ce proche du maire redoute même un vote sanction. Il affirme que le choix d’un autre candidat risque de faire éclater de la coalition Benno Bokk Yaakaar et de mener la coalition à la défaite. D’ailleurs, les jeunes apéristes de Guédiawaye ont manifesté dimanche dernier, devant les grilles du Palais de la République, pour exiger du président Macky Sall qu’il fasse d’Aliou Sall la tête de liste départementale. A Podor, des jeunes de l’île à Morphil, d’une dizaine de localités, ont décidé de sanctionner l’Apr si leur leader politique n’est pas investi aux législatives. Ces jeunes, tous des militants de la première heure, se disent oubliés par le régime car n’ayant jamais eu de députés ni ministre encore moins de Pca.
Même chez les alliés de la première heure, l’idée de présenter des listes a germé dans les têtes depuis l’année dernière. En effet, au lendemain de la publication de la liste du président de la République portant nomination des 70 membres du Haut conseil des collectivités territoriales (Hcct), des partis membres de la coalition Macky2012, regroupés autour de la coalition Les Républicains Doomi rewmi avaient pris la décision de présenter des listes concurrentes aux législatives du 30 juillet. En octobre 2016, ils brandissaient la menace de listes parallèles, car accusant le président Macky Sall de ne favoriser que ce qu’ils appellent le Benno des cinq: l’Apr, le Ps, l’Afp, la Ld et le Pit. «Aujourd’hui, la coupe est vraiment pleine. Ce qui s’est passé avec le Haut conseil des collectivités territoriales est l’humiliation de trop. Nous ne sommes plus disposés à continuer d’avaler des couleuvres. Dorénavant, nous ne comptons plus nous laisser faire. Nous allons nous battre. Nous allons faire face au Benno des cinq qui est la cause du désordre dans cette coalition», avaient dit ces protestataires. Alors que d’après lui, ces alliés de la dernière heure ne pèsent plus rien du tout. D’ailleurs, beaucoup de leaders de cette coalition avaient présenté des listes parallèles lors des dernières élections locales.
Walf Quotidien