Des habitants ont découvert mardi près de Tripoli les corps de 74 migrants morts noyés après le naufrage de l’embarcation dans laquelle ils tentaient de rejoindre l’Europe, les autorités italiennes annonçant avoir secouru 630 migrants au large de la Libye.
Le Croissant-Rouge libyen (CRL) a indiqué sur sa page Facebook que des bénévoles s’étaient rendus à Harcha (45 km à l’ouest de Tripoli) «pour récupérer 74 cadavres de migrants».
Selon le CRL, ces habitants ont découvert un bateau échoué sur la plage avec à l’intérieur plusieurs cadavres de migrants clandestins.
Mais le Croissant-Rouge local se plaint du manque de moyens et a affirmé ne pas disposer «des véhicules appropriés pour transporter les corps ou de cimetières pour les inhumer».
«Certains corps sont restés sur la plage et d’autres, inaccessibles, flottent encore dans l’eau», a précisé le CRL sur Facebook.
Mardi à la tombée de la nuit, les corps se trouvaient toujours sur la plage, a constaté un photographe de l’AFP.
Dans un communiqué, les gardes-côtes italiens ont annoncé avoir secouru quelque 630 migrants dans la nuit de lundi à mardi au large de la Libye, lors de deux opérations distinctes de sauvetage. Ils dérivaient sur une grande barque et sur un pneumatique.
La Libye, plongée dans le chaos depuis la chute en 2011 de Mouammar Kadhafi, est devenue un carrefour de l’immigration clandestine vers l’Europe.
En 2016, plus de 180 000 migrants sont arrivés sur les côtes italiennes, un niveau record, tandis quelque 4500 personnes ont perdu la vie en cherchant à les atteindre. Environ 90% de ces personnes, qui viennent surtout d’Afrique subsaharienne, ont transité par la Libye.
Les passeurs organisent des départs, généralement depuis les côtes de l’ouest du pays, les plus proches de Malte et de l’Italie, pays membres de l’Union européenne.
En l’absence d’une armée ou d’une police régulières, plusieurs milices font office de gardes-côtes et sont souvent accusées de complicité, voire d’implication dans ce trafic lucratif.
«Situation grave»
L’Organisation internationale pour les migrations (OIM) notait la semaine dernière «une forte hausse du nombre d’arrivées en Italie par rapport à la même période l’année dernière», de l’ordre de 30%.
Mardi, l’OIM a indiqué que 232 migrants ont péri depuis le début de l’année en tentant de rallier l’Italie par la route maritime de Méditerranée centrale, contre 92 l’an dernier à la même époque, un chiffre qui ne comprend pas le bilan du naufrage de Harcha.
Selon la même source, l’embarcation retrouvée à Harcha se serait échouée dimanche.
«Les passeurs auraient volé le moteur et abandonné le bateau», a indiqué l’organisation, ajoutant qu’un «survivant, dans le coma, a été transporté à l’hôpital».
Les Européens envisagent des mesures pour bloquer l’arrivée de milliers de migrants depuis la Libye, mais leurs plans sont critiqués par des organisations internationales et ONG qui redoutent de mauvais traitements à l’encontre des migrants bloqués en Libye.
L’Italie et la Libye ont de leur côté signé un mémorandum d’accord prévoyant un renforcement de leurs frontières respectives pour parvenir, avec l’aide de l’UE, à endiguer les flux migratoires.
L’émissaire des Nations unies pour la Libye Martin Kobler s’est rendu mardi dans un centre de rétention à Tripoli où il a affirmé qu’il évoquerait la question du rapatriement volontaire des migrants avec les autorités libyennes.
«Ils n’ont pas assez de nourriture. La situation est grave ici et il est important de résoudre leurs problèmes d’ordre humanitaire», a-t-il averti. «S’ils souhaitent rentrer chez eux, il faut faire en sorte qu’ils puissent le faire.»
La directrice régionale de l’OIM pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord, Carmela Godeau, qui a effectué une visite séparée mardi dans le même centre de rétention, a indiqué à l’AFP qu’il était «très important d’aider les autorités libyennes car les Libyens souffrent également de la situation actuelle».
Le naufrage de Harcha est a priori le plus meurtrier sur les côtes libyennes depuis celui survenu le 14 janvier, qui avait fait 180 disparus.
La pire catastrophe en Méditerranée depuis des décennies a eu lieu en avril 2015 au large des côtes libyennes quand jusqu’à 800 migrants venant d’Afrique de l’Ouest avaient péri dans le naufrage d’un chalutier qui avait percuté un cargo portugais venu lui porter secours.
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