Un bébé, victime du naufrage d’un bateau de réfugiés entre la Turquie et l’île grecque de Lesbos, gît sur une plage du village turc de Bademli le 30 janvier 2016 (AFP / Ozan Köse)
ÇANAKKALE (Turquie), 1er février 2016 – Quand j’arrive sur la plage de galets, le premier cadavre que je vois est celui d’un bébé. Il doit avoir neuf ou dix mois, il est chaudement couvert et porte un bonnet. Une tétine orange est accrochée à ses habits. A côté de lui gisent un autre enfant, âgé de huit ou neuf ans, ainsi qu’une adulte, leur mère peut-être.
Sur le moment, je ne sais pas quoi faire. Je prends quelques photos. Je parcours la plage, je vois le corps d’un autre enfant sur un rocher. Par la suite je ferai des cauchemars, je serai durant des heures incapable de parler, mais à cet instant je ne ressens rien de particulier. Les gendarmes turcs sont occupés à ramasser d’autres noyés échoués sur la plage après le naufrage de la nuit précédente. Il y a tellement de cadavres… Je n’arrive pas à les compter.